Seulement 42 series A en 2021 !
Étude sur la probabilité pour lever une series A. Beaucoup de prétendants pour prendre l’argent VCs, mais peu d’élus à la fin.
Vous trouverez dans cet article, une étude sur les “séries A” en 2021, que nous avons publiée mercredi 28 septembre 2022.
Le résultat a été surprenant 🫣.
Seulement 42 startups ont levé une “série A” en 2021, auprès des fonds VC les plus actifs :
Cela fait même plusieurs années que nous préparions cette étude, car nous avions déjà compris qu’il y avait un décalage entre les effets d’annonces sur les levées de fonds record et la réalité du terrain.
En décembre 2018, j’écrivais déjà sur le sujet du taux de conversion des deals business-angel vers les tours VC : “Si j’étais BA, j’investirais comme F3A”.
“Est-ce que tu penses lever ? - Oui, c’est prévu !”
Les entrepreneurs, qui ont monté une startup, n’emploient plus le conditionnel lorsqu’ils parlent de lever des fonds. Régulièrement dans mes discussions avec des fondateurs de startups, j’entends des phrases qui me choquent :
“On lèvera Q3 de cette année”.
“On va attaquer notre roadshow et on lève dans 3 mois”.
“La probabilité pour réussir le tour d’après ? Je ne me suis jamais posé la question, mais bon, on a au moins 80% de chances de le réussir”.
Les réponses donnent l’impression que tout est sous contrôle. Que lever avec des VCs n’est juste qu’une étape. Une formalité administrative.
Dans un article d’octobre 2018, j’avais déjà traité de ce sujet : “Vers une V2 de l’écosystème startup : moins de toxicité pour l‘entrepreneuriat”
Dans cet article, je faisais remarquer qu’il y avait beaucoup de prétendants pour prendre l’argent VCs, mais peu d’élus à la fin.
Je mettais aussi en perspective les mécaniques qui ont créé cette confusion. Je proposais aussi des pistes pour rectifier le tir, en passant par une réflexion sportive.
4 ans après, rien n’a changé. Mais aujourd’hui nous avons plus de données et de recul sur ce phénomène. C’est le bon moment de revenir sur le devant de la scène et de marteler encore plus fort ce message !
Beaucoup de prétendants pour prendre l’argent VCs, mais peu d’élus à la fin.
L’objectif de l’étude que nous avons publié n’est pas de donner une probabilité exacte sur les chances de lever une series A, mais plutôt de donner un ordre de grandeur proche de la réalité.
L’important est de montrer que le nombre de deals fait par les VCs n’est pas infini. Au contraire, il y a peu de place à disposition chaque année. La question était combien ? 1000 ? 100 ? Peut-être moins ?
Personne n’a vraiment traité ce sujet. Au contraire, lorsque l’on voit certaines études, l’angle éditorial a pour message l’abondance des opportunités et les montants croissants injectés dans les “startups”, c’est super excitant 🤩.
Malheureusement, ce genre de messages a fait baisser la garde des entrepreneurs, et leur a fait croire que rejoindre un fonds VC était comme un contrôle continu, alors qu’en réalité c’est un examen super “select”.
C’est un examen super “select” et pas un contrôle continu !
L’idée, derrière la prise de conscience que j’espère faire émerger, est que l’on regarde l’investissement VC comme on regarde un examen dans une école hyper “select”.
Toute personne qui rêve de faire Polytechnique-X, sait dès le plus jeune âge, que ça va être très dur, voire impossible, au regard des places limitées. En 2022 il n’y as eu que 432 places de libres pour le cycle ingénieur, avec plus de 50K étudiants en prépa scientifique et 5000 étudiants en moyenne qui présentent le concours. Ainsi, les plus déterminés sont prêts à faire certains sacrifices et ils travaillent très très dur pour augmenter leurs chances. Ils se préparent aux examens, en allant dans une prépa (elle aussi très sélective) et tout au long du cursus ils font des examens blancs.
C’est pareil pour l’ENS avec ses 800 places par an. Ou dans le sport, pour rejoindre le Pôle France Basket-Ball de l’INSEP, où il faut prendre une des 50 places libres chaque année 🏀.
Photo by Akshay Chauhan on Unsplash
Comprendre notre approche pour cette étude
Nous avons pris une liste de VCs bien spécifique comme point de départ de cette analyse. L’objectif était de créer un cadre d’analyse plus précis pour éviter d’être dans des grandes moyennes, qui sont la source de beaucoup de confusions.
Voici les critères pour qu’un fonds VC soit dans cette liste :
Fonds actif depuis plusieurs années sans interruptions.
Avoir des licornes dans son portfolio. Ou des soon-licornes.
Une équipe “venture” dédiée et indépendante.
Une bonne réputation auprès des entrepreneurs.
Des fonds qui ne sont pas généralistes sur leur approche de l’investissement, et ne font que du “venture”, pas de private-equity, ni de l’immobilier, voire des deals biotech ou industrie.
Qui sont compétitifs et se bagarrent sur les deals les plus chauds du marché.
Être visible et avoir développé une marque.
Nous avons donc pris le portfolio de ces fonds et un par un nous avons isolé les investissements réalisés en 2021. Nous nous sommes appuyés sur Dealroom pour regarder les portfolios. Pourquoi Dealroom ? Eh bien c’est la meilleure plateforme européenne 🇪🇺. Nous avons uniquement utilisé Dealroom, pour avoir une cohérence par rapport aux données et avoir la même grille de lecture.
La plus grosse difficulté a été de trouver un chiffre cohérent sur le nombre de startups ayant déjà ouvert leur capital, à l’étape que l’on définit comme pre-seed et seed. Le problème est que chacun a son interprétation de ce qu’est un tout en pre-seed et seed. Dans notre cas, on a considéré ceci :
Est en pre-seed et seed, toutes les entreprises qui se nomment “startup”, qui raconte faire de “l’innovation”, et parce qu’elles ont injecté des fonds propres dans leur entreprise, alors elles ont bénéficié de prêts et de subventions de la part de BPI (et autres acteurs connexes).
Après de nombreuses discussions sur les 6 dernières années, nous considérons qu’il y a au moins 5000 entreprises par an, avec leur HQ en France, qui répondent à cette définition.
Nous avons remarqué que systématiquement, ces entreprises ont prévu dans leur BP, une nouvelle injection de fonds dans les 24 mois, forcément supérieure à la précédente. Dans ces cas-là, lorsque le montant est supérieur à 2M€, il y a de fortes chances que l’on doit s’adresser à des VCs, et dont les acteurs cités dans ma liste.
Ce qui donne le résultat suivant, 42/5000 = 0,86% :
Bien entendu pas tout le monde est égal face à cette moyenne. Je le répète, l’intérêt de cette étude est de parler du nombre limité d’opportunités pour signer un deal avec un VC, et non pas de définir une probabilité exacte.
Qui sont les fondateurs de ces 42 startups ?
Nous avons regardé qui était les fondateurs de ces 42 startups, pour voir s’ils avaient des choses en commun. Et nous avons trouvé 4 attributs récurrents :
Une expérience dans une startup VC-backed.
Une expérience entrepreneuriale par le passé.
Passés par une école préparatoire très sélective : Sainte-Geneviève, Louis-le-Grand, Henri IV, Stanislas…
Travaillé en consulting : McKinsey, Bain, PwC, Cap Gemini…
Un autre élément qui nous a marqués est que seulement 6 startups sur 42, avaient des fondateurs qui n’avaient pas les attributs cités plus haut.
Bien entendu, peu de femmes parmi les fondateurs de ces 42 startups : Seulement 7 fondatrices sur 95 fondateurs.
NB : Je n’ai aucune interprétation à faire pour l’instant sur les éléments que les données proposent, ni même un a priori. Je découvre avec vous tout cela.
“Dealroom indique 122 series A !?”
C’est vrai que Dealroom annonce que 122 startups (🇫🇷) ont fait une series A en 2021. Alors pourquoi n’ai-je compté que 42 startups dans mon étude ? Est-ce une erreur ? Pourquoi un tel écart ?
Nous avons regardé une par une ces 122 lignes. Et selon notre approche elles ne peuvent pas être toutes considéré comme des “series A”.
Voici les résultats :
Dealroom reprend ce que les médias et les startups déclarent. Ils sont très tolérants. Et des erreurs d’interprétations peuvent donc se glisser dans les bases de données. Par exemple 27 deals ne sont pas des series A.
Ils reprennent aussi tous les types d’investissement, en passant par la biotech, l’industrie, voire les rares investissements fait avec des entreprises de type média ou agence : 27 deals.
3 deals sont annoncés comme des series A, mais en fait, ce sont des entreprises bootstrappé, qui ont pris un investissement auprès de Private Equity.
13 deals ne sont pas confirmés.
Parmi les 42 series A que je compte avec ma méthode, Dealroom n’en comptent que 26. Un exemple tout bête, Groover est identifié comme une startup qui a fait un tour “Early VC”, alors que pour 7M€, on est sur une series A :
Et certains deals en series A ont été faits par des “fonds” qui ne sont pas dans ma liste : 20 startups financées par ces fonds sur 122.
Don’t look up !
Je sens encore beaucoup de réticences lorsque j’expose mon point de vue. Il est clair que pour une grosse partie de l’écosystème ce n’est pas facile à entendre.
Par moments, cela me rappelle le film “Don’t look up”. Les chiffres sont là, les places sont limitées pour faire partie de ces “happy few” qui bénéficieront de l’argent des VCs, et pourtant, on ne regarde pas dans la bonne direction.
Ce discours n’est pas encore bienvenu dans les lieux d’accompagnements, comme les incubateurs, accélérateurs ou campus de startups. Et pourtant, il y a une belle opportunité à saisir en acceptant cette réalité. Nous serions le premier écosystème entrepreneurial à prendre conscience de cela et donc une longueur d’avance par rapport aux autres pays. Un avantage concurrentiel et donc une opportunité pour passer à la V2 de l’écosystème startup, avec une nouvelle approche plus exigeante.
Merci Dealroom pour l’accès aux données, qui est un outil indispensable pour comprendre le VC game 💪.
Vous ne savez pas si vous votre projet est éligible à une levée VC ? Vous vous demandez si vous avez pris la bonne direction ?
Contactez-nous et on vous parlera de notre examen blanc : “l’Audit VC compatible”
Julien@mighty9.co